Saint Nicolas
Sa vie
Nicolas est né vers 270 en Lycie (dans l’actuelle Turquie). Orphelin dès son jeune âge, Il a grandi et vécu comme citoyen romain lors des dernières persécutions des chrétiens, sous le règne de l’empereur Dioclétien.
Avec la fortune que ses parents lui ont léguée, il a eu le souci constant de faire du bien autour de lui. Il devint évêque de Myre vers l’an 300 et a peut-être participé au concile de Nicée en 325 sous le règne de l’empereur Constantin, favorable à la nouvelle religion et meurt un 6 décembre, vers 335.
Sa vie est mal connue, mais la réputation d’intercesseur et de thaumaturge qu’il a acquise donna lieu à de nombreux récits hagiographiques. Le contenu de ceux-ci vise, non pas à relater des faits historiques, mais à dispenser un enseignement moral ou proposer un modèle à suivre. C’est ainsi qu’il nous apparaît comme un personnage généreux, soucieux de la dignité humaine, attentif aux faibles, aux malheureux, aux victimes de la ruse, de la corruption ou de l’injustice, aux personnes en danger ou dans le besoin. Au Moyen Age, il fut au le saint le plus populaire après la Vierge, reconnu comme le protecteur des enfants, des jeunes gens à marier, des prisonniers, des navigateurs et autres voyageurs, mais aussi de nombreuses corporations (bouchers, tonneliers, meuniers, avocats…).
Saint Nicolas est considéré comme le patron de la Lorraine depuis René II (duc de Lorraine de 1451 à 1508), mais ses prédécesseurs le vénéraient déjà (certains historiens font remonter son patronage à Mathieu II, duc de 1200 à1251).
La translation à Bari
Si les restes de saint Nicolas reposèrent à Myre, leur translation à Bari, un grand port d’embarquement vers la Terre sainte au sud de l’Italie, eut lieu en 1087. La ville de Myre était alors tombée aux mains des Turcs et plusieurs expéditions s’organisèrent pour les soustraire à une terre devenue musulmane. Des marins affrétèrent trois navires déguisés en navires marchands. Ils accostèrent près de Myre, enlevèrent le corps de saint Nicolas et le ramenèrent à Bari. En deux ans, on construisit à Bari en l’honneur de saint Nicolas une vaste basilique, sous l’autel de laquelle on déposa dans une crypte les précieuses reliques.
L'arrivée de la relique à Port
L’histoire a retenu qu’un chevalier nommé Aubert de Varangéville, de passage à Bari, aurait rapporté une phalange de saint Nicolas (la “dextre bénissante”) qu’il déposa au village de Port vers 1090. La décision de construire la première église destinée à l’abriter et recevoir les pèlerins fut prise par l’abbé Henri de Gorze peu avant sa mort survenue en 1093.
Aubert était-il de passage à Bari au retour d’un pèlerinage en Terre sainte ou à Rome ? A-t-il été missionné par l’abbé de Gorze qui vouait une grande admiration à saint Nicolas ? Nul ne le sait. Mais, ce qui est sûr, c’est qu’Aubert n’était pas de retour de croisade, car la 1re croisade ne fut prêchée qu’à la fin de 1095, plusieurs années après l’arrivée de la relique à Port. Et cette relique, l’a-t-il volée ou achetée ? Plutôt volée, et avec la complicité du gardien du tombeau si on en croit la légende. Subtiliser des reliques était commun et, bien que non approuvé par l’Eglise, considéré comme une œuvre pie à une époque où un véritable culte des reliques s’était organisé, conduisant, grâce aux pèlerins attirés par leur présence,à la prospérité des églises qui en possédaient.
La relique
Des reliquaires somptueux, aujourd’hui disparus, ont été offerts par le duc Charles II en 1421 et par le duc René Ier d’Anjou en 1471, pour abriter et exposer la «dextre bénissante», relique de saint Nicolas rapportée de Bari vers 1090.
Ces reliquaires n’existent plus. Mais où se trouve actuellement la fameuse «dextre bénissante» ? Nul ne le sait, car ce ne sont pas moins de 7 parcelles d’ossement de saint Nicolas que possède la basilique, de provenances souvent incertaines…
Ce qui est certain, c’est qu’il y a eu à Saint-Nicolas-de-Port une relique de saint Nicolas suffisamment célèbre pour attirer de loin des foules considérables, et que de toutes les reliques de saint Nicolas, c’est celle de Saint-Nicolas-de-Port qui a eu le plus de succès avec celles de Bari.
Ces reliques sont préservées dans la salle du trésor de la basilique et sont visibles au cours des visites guidées organisées par l’association.
Les pèlerinages et les processions
Les pèlerinages commencèrent dès l’arrivée des reliques à Port. Les récits des miracles décuplèrent la foule des pèlerins qu’il fallut nourrir et héberger :à côté des activités du grand commerce international, ce fut l’autre raison du développement de la cité.
Des nombreuses processions organisées autour des reliques du saint, seules subsistent aujourd’hui celles du 6 décembre et du lundi de Pentecôte.
Tous les ans, dans la soirée du samedi le plus proche du 6 décembre (fête de la Saint-Nicolas), une procession se déroule dans une basilique plongée dans la pénombre, éclairée des seuls flambeaux des participants, souvent venus de fort loin. Elle aurait été instituée par le sire de Réchicourt en 1245 pour commémorer sa légendaire délivrance miraculeuse intervenue… 5 ans plus tôt.
Une ambiance émouvante et féérique, la piété et le folklore cohabitant avec bonheur. La confiance et la fierté des Lorrains sont exprimées dans un cantique de quelque 50 couplets dont le refrain est repris à tue-tête par les participants.
Saint Nicolas et la fête du 6 décembre
Saint Nicolas est fêté sur le calendrier le 6 décembre mais à Saint-Nicolas-de-Port, le pèlerinage, les festivités et défilés ont lieu le samedi le plus proche de cette date. Selon la tradition, c’est un chevalier croisé, Cunon de Linange, sire de Réchicourt qui aurait instauré l’actuelle procession suite à son extraordinaire aventure.
Prisonnier des Musulmans au cours de la sixième croisade, il pria si fort saint Nicolas qu’à la veille de sa fête, au petit matin d’un 5 décembre, il se serait réveillé en Lorraine, sur le parvis de l’église de Saint-Nicolas, encore muni de ses chaînes et de son carcan de fer, miraculeusement transporté par la voie des airs. Depuis ce jour, il fut décidé de commémorer cette délivrance au cours de la procession dite « du sire de Réchicourt ».
Fête religieuse et fête profane sont intimement liées. En cette froide journée de décembre, les pèlerins et le public viennent nombreux applaudir le cortège de fanfares et de chars décorés et parés avec soin sur l’un desquels saint Nicolas parcourt les rues de la ville, accompagné de ses inséparables comparses, le Père Fouettard et le boucher. Des bonbons sont distribués aux enfants et le maire remet officiellement les clés de la ville au saint patron de la Lorraine. Un marché de Saint-Nicolas, dressé pour l’occasion, regroupe les artisans et les associations de la ville et un grand feu d’artifice conclut le défilé.
Le soir, en nocturne, dans la basilique, plusieurs milliers de pèlerins se pressent à la procession aux flambeaux pour entonner en chœur un traditionnel cantique dédié à saint Nicolas, protecteur de la Lorraine.
Le bras-reliquaire de saint Nicolas, un trésor disparu pendant 25 ans
Communément appelé « le bras d’or », le bras-reliquaire mesure 77 centimètres et pèse 6 kilos. Il a été réalisé en 1892-1893 par la maison Berger-Naime de Lyon. C’est Émile Badel (1861-1936) qui l’a conçu en traçant le dessin d’exécution. Ce bras-reliquaire remplace les deux autres offerts par le duc Charles II de Lorraine et René d’Anjou, disparus au cours des vicissitudes de l’histoire, l’insigne relique ayant été miraculeusement sauvée. Le projet a vu le jour grâce à la générosité de Mme Joseph Claudel.
Par ses dimensions, sa forme extérieure et sa décoration, ce bras-reliquaire rappelle le fameux bras d’or offert par René d’Anjou. Il est composé de quatre parties : la base carrée, le manchon, le bras et la main. Les faces de la base carrée présentent des inscriptions et des écussons. Sur la face antérieure, les écussons d’Anjou, de Jérusalem, d’Aragon et sur les faces latérales ceux du pape Léon XIII et de Mgr Turinaz, évêque de Nancy à l’époque.
Le manchon, haut de 21 cm, de forme ronde, est orné d’un émail qui représente saint Nicolas escorté de deux anges en relief. Cet émail a remplacé le célèbre « Camée de Nancy », magnifique trésor réalisé au premier siècle après JC, représentant le triomphe de Néron et qui ornait le reliquaire original. Ce bijou fut retiré du bras en 1792 lorsque les révolutionnaires confisquèrent le reliquaire, fait d’or, d’argent et de vermeil pour en récupérer les précieux métaux. Le camée est aujourd’hui conservé à la bibliothèque municipale de Nancy mais n’est pas accessible au public.
Sur l’autre face du manchon, la Sainte famille est figurée par une peinture sur émail. Au-dessous sont les armes pleines des ducs de Lorraine. Figurent aussi les écussons de René d’Anjou et de son épouse, Jeanne de Laval, surmontés par deux topazes.
La relique qui orne le manchon est enchâssée dans une « gloire » au verre biseauté à rayons formés par des pierreries. Elle repose sur un coussin de velours rouge. Le médius de la main qui bénit porte un anneau pastoral d’or avec, au chaton, une émeraude.
elique qui orne le manchon est enchâssée dans une « gloire » au verre biseauté à rayons formés par des pierreries. Elle repose sur un coussin de velours rouge. Le médius de la main qui bénit porte un anneau pastoral d’or avec, au chaton, une émeraude.
VOLÉ EN 1905
Dans la nuit du 6 au 7 décembre 1905, année de la séparation de l’Église et de l’État, le bras reliquaire fut volé ainsi que diverses pièces du trésor. Le motif de ce « vol » fut probablement de le subtiliser à l’inventaire des biens de l’Eglise. Vingt-cinq ans plus tard, en 1930, au soir de la traditionnelle procession, le curé Guillaume, qui préparait l’office, découvrit sur le maître-autel la totalité du trésor disparu. Où, pendant tout ce temps, le trésor était-il caché ? Quelques portois affirmèrent que le trésor disparu depuis 1905 fut retrouvé à l’occasion de travaux de rénovation dans un placard à double fond d’une maison de la rue Jolain, ancienne propriété des sœurs Girardin. Le facétieux curé Guillaume aurait imaginé la miraculeuse restitution. C’est pendant la préparation de la procession du 6 décembre 1932 que le curé Guillaume fut pris d’un malaise. Transporté à la cure, il y décédait alors que dans l’église se poursuivait l’office.
D’où vient la légende des trois petits enfants
ressuscités par saint Nicolas ?
Cette légende raconte que saint Nicolas en se rendant au concile de Nicée (juillet 325) s’arrêta dans une hôtellerie. Là, il demanda de la viande de carême car il pratiquait l’abstinence. L’hôtelier lui apporta ce qu’il prétendit être du poisson salé.
On dit que peu de temps avant le passage de saint Nicolas, l’hôtelier avait égorgé trois petits garçons dont il avait mélangé la chair dans des saloirs avec de la viande de porc.
C’est celle-ci qu’il s’apprêtait à servir à saint Nicolas qui, intrigué lui demanda s’il en avait davantage. L’hôtelier lui montra alors trois gros vases. Après y avoir jeté un coup d’œil, saint Nicolas qui ne fut pas dupe, réprimanda très sévèrement l’hôtelier. Alors que saint Nicolas récitait une prière, les trois enfants se levèrent pleins de vie. L’hôtelier reconnu alors son odieux crime avec force repentir.
Cette légende des trois enfants ressuscités n’est pas racontée dans le monde oriental grec. Elle aurait vu le jour à la fin du XIe siècle. La plus ancienne version recensée est celle d’un texte de Godehard, évêque d’Hildesheim (Basse Saxe). Dans un poème de Robert Wace écrit entre 1140 et 1150, il est question de trois écoliers tués par un aubergiste mais plus loin il y a l’histoire d’un riche marchand assassiné par un aubergiste pour lui voler son argent et qui est « ressuscité »par saint Nicolas.
Tout ceci doit certainement découler d’une tradition orale qui aurait pour origine l’affaire des officiers de Constantin. Dans l’iconographie ancienne, ces trois officiers sont représentés dans une tour, alors que saint Nicolas, vu son importance, est dessiné bien plus grand. Au fil du temps, on a bien pu prendre la tour pour un cuveau ou un saloir et les trois officiers pour trois enfants. On notera cependant que Jacques de Voragine dans la « Légende Dorée » composée avant 1264 ne mentionne pas cet épisode dans la vie de saint Nicolas.